Question parlementaire à Didier Reynders

Question parlementaire de Marco Van Hees, député fédéral  du PTB

 

Cela va faire presque soixante ans que les États-Unis imposent un blocus contre Cuba. Le 1er novembre 2018, l'Assemblée générale des Nations Unies s'est prononcé pour la 23e fois en faveur de la levée de ce blocus. La résolution a été approuvée par 189 pays, seuls les États-Unis et Israël votant contre. Ce blocus a des effets jusque dans notre pays. Ainsi, des ONG belges ont récemment révélé que quatre grandes banques actives en Belgique avaient bloqué le versement d'une aide humanitaire à Cuba après le passage de l'ouragan Irma l'an dernier. Même des transferts financiers entre comptes bancaires européens sont refusés lorsque la communication des virements fait référence à Cuba. Pourtant, depuis 1996, il existe une réglementation européenne qui permettrait de s'opposer à ce blocus américain. Le règlement 2271/96 déclare illégaux les effets extraterritoriaux du blocus. L'article 5 de ce règlement interdit aux entreprises et aux personnes de se conformer à des ordres ou des règles issus des lois illégales du blocus. L'article 9 oblige même chaque État membre à définir des sanctions en cas d'infractions. Mais la mise en oeuvre de cette réglementation reste lettre morte. Relevons toutefois que, le 24 septembre 2018, Frederica Mogherini, Haute représentante de l'Union européenne pour les Affaires étrangères, a déclaré, suite à la dénonciation par le président Trump du traité avec l'Iran: "Aucun pays souverain ou aucune organisation ne peut accepter qu'un autre pays définisse avec qui on peut faire du commerce". Ces propos sont particulièrement appropriés pour apprécier le blocus américain contre Cuba: comment, en effet, tolérer que Washington impose ses diktats aux entreprises européennes, y compris sur le territoire même de l'Union? Envisagez-vous de prendre des initiatives au niveau de l'Union européenne afin que celle-ci puisse riposter à ces entraves des États-Unis contre la liberté de commerce des entreprises européennes?

 

Réponse de Didier Reynders


La Belgique est parfaitement consciente de ce problème que vous avez raison de souligner. La Belgique dénonce clairement l'embargo américain contre Cuba, non seulement en ce qui concerne ses effets concrets pour la population cubaine mais également en raison de la portée extraterritoriale, dans les faits, des sanctions américaines qui affectent également les intérêts des pays membres de l'UE. Comme vous le savez, l'UE a procédé, en août 2018, à l'actualisation du règlement 2271/1996 (le blocking statute) avec le but de formuler une réponse adéquate aux menaces de sanctions américaines qui pèsent sur des entreprises européennes souhaitant effectuer des transactions avec les pays ciblés par la législation américaine, en l'occurrence Cuba et l'Iran. La Belgique appuiera toute initiative permettant de sauvegarder la liberté de commerce ainsi que la souveraineté européenne en matière commerciale et attache une grande importance à l'unité européenne en cette matière; car l'approche, selon nous, doit effectivement être d'abord européenne sur ce point avant d'être nationale.